Voici, avec ce poème sous-titré « Étrennes », des vœux de bonne fortune que Paul Scarron adressa à Ninon de Lenclos1 pour la nouvelle année :
Ô belle et charmante Ninon,
À laquelle jamais on ne répondra non,
Pour quoi que ce soit qu’elle ordonne
Tant est grande l’autorité
Que s’acquiert en tous lieux une jeune personne,
Quand avec de l’esprit elle a de la beauté.
Puisque hélas à cet an nouveau
Je n’ai rien d’assez bon, je n’ai rien d’assez beau
De quoi vous bâtir une étrenne,
Contentez-vous de mes souhaits ;
Je consens de bon cœur d’avoir grosse migraine,
Si ce n’est de bon cœur que je vous les ai faits.
Je souhaite donc à Ninon
Un mari peu hargneux, mais qui soit bel et bon,
Force gibier tout le carême,
Bon vin d’Espagne, gros marron,
Force argent sans lequel tout homme est triste et blême
Et qu’un chacun2 l’estime autant que fait Scarron.
Paul Scarron,
Recueil de quelques vers burlesques, 1643
1. Célèbre courtisane.
2. Et que chacun.